Une congrégation qui fait la part belle à l’union entre religieux et laïcs, enseignants et parents, publics favorisé et défavorisé… Ce sont les sœurs de la Sainte-Union qui, depuis le début du 19e siècle, œuvrent ainsi à l’éducation des plus démunis.
Historique
La congrégation des Sœurs de la Sainte-Union est fondée en 1828 dans le nord de la France par l’abbé Jean-Baptiste Debrabant (1801-1880). En ce début de 19e siècle, marqué par la révolution française, la pauvreté et le manque d’instruction, ce tout jeune prêtre apporte notamment son aide dans les prisons et à l’Hôtel-Dieu. Il s’occupe également des enfants manquant d’instruction et de catéchèse, ainsi que des parents, qu’il aide à avancer dans la foi et à collaborer à l’éducation de leurs enfants. J-B. Debrabant rencontre alors quatre femmes catéchistes, avec lesquelles il fonde une première école, à Douai, en 1828. Dans la foulée, les sœurs créent d’autres écoles dans le nord de la France et une première en Belgique, à Kain, en 1833. De son vivant, J-B. Debrabant envoie aussi des sœurs en Angleterre et en Irlande et n’a qu’un souhait, avant de mourir : que des religieuses partent en Amérique. Très vite, après son décès, en 1880, des sœurs partent en Argentine et d’autres aux Etats-Unis. La congrégation s’est également développée en Afrique, avec des communautés au Cameroun et en Tanzanie, et est présente en Haïti depuis une trentaine d’années. L’instruction et l’éducation des plus démunis ont toujours été les principaux soucis du fondateur. Il insistait beaucoup sur l’union entre les sœurs ainsi qu’avec les laïcs, les parents et autres collaborateurs impliqués dans l’éducation.
« Unis pour servir », telle est la devise de l’Institut de la Sainte-Union à Dour, où tout est mis en œuvre, aujourd’hui, pour vivre au quotidien les préoccupations de Jean-Baptiste Debrabant (cfr encadré). « Au fil du temps, l’école s’est appropriée son message, qui était de venir en aide aux plus démunis en leur donnant au moins une éducation, raconte Manu Bortolin, directeur adjoint de cet établissement d’enseignement secondaire ordinaire, technique et professionnel. Etre « unis pour servir » reste à présent notre leitmotiv et fait toute la force de notre équipe éducative. Même si n’avons plus de lien direct avec les sœurs de la Sainte-Union, l’école reste dépositaire de leur message. » Celui-ci est inscrit au cœur du projet d’établissement et donne le ton de la pastorale scolaire et du cours de religion. « Nous essayons aussi de rappeler aux élèves l’histoire de leur école, fondée en 1844, poursuit Manu Bortolin. A l’époque, dans cette région industrielle touchée par la misère sociale, à la limite du Borinage, les défis ne manquaient pas. »
Des enseignants impliqués
L’école de Dour organisait, au départ, uniquement de l’enseignement primaire pour filles ; elle s’est ouverte aux garçons au début du XXe siècle, et à l’enseignement secondaire après la seconde guerre mondiale (1947). Au fil des ans, l’établissement a continué à évoluer, ouvrant d’abord des sections professionnelles, ensuite de l’enseignement technique et enfin, dans les années 70, de l’enseignement général, qui est devenu aujourd’hui sa section principale. L’Institut de la Sainte-Union a toutefois toujours gardé et ravivé l’esprit de son fondateur. « On essaie en effet, nous aussi, de venir en aide aux élèves en difficulté, raconte Manu Bortolin. On a notamment créé une école de devoirs, pour soutenir les élèves du 1er degré. Les enseignants assurent des permanences pendant les vacances, à partir du 16 août, pour aider les plus défavorisés à préparer leur deuxième session. On a aussi développé un premier degré différencié. L’objectif est de faire en sorte que les élèves puissent au moins lire et écrire à la fin de la 2e secondaire, et qu’ils puissent ainsi entrer dans le monde du travail, même s’ils n’obtiennent par de diplôme. » Et, pour que les enseignants s’impliquent pour relever ces défis, on leur rappelle régulièrement le projet d’établissement, l’histoire de l’école et le message de la congrégation, notamment lors de journées pédagogiques. « Avec l’aide des enseignants, on a ainsi pu organiser, avant Pâques, une marche parrainée destinée à financer différents projets de solidarité. Par exemple, pour marquer notre ouverture sur le monde, on soutient un projet des travailleurs de la terre, aux Philippines. En février, on a organisé un WE d’animation théâtrale, pour venir en aide à une collègue dont deux des trois filles sont atteintes d’une maladie dégénérative. On essaie toujours de mobiliser les élèves. On tient aussi une caisse d’entraide, car on souhaite qu’ils puissent tous participer aux visites et voyages que nous organisons. »
Ensemble, c’est tout
A Dour, la population scolaire de l’institut a explosé depuis qu’il organise de l’enseignement général, il y a une trentaine d’années. « De 350 élèves, nous sommes passés aujourd’hui à 1160 jeunes, précise Manu Bortolin. Mais, nous avons malgré tout gardé une section technique et professionnelle. C’est ce qui fait également la richesse de l’école. Il n’y a pas de séparation entre l’enseignement technique, le professionnel et le général. C’est une seule et même école. Les élèves sont tous mélangés dans la cour de récréation, dans les couloirs, le réfectoire et les projets se font toujours ensemble. Ce mélange de milieux sociaux est une richesse particulièrement importante dans notre région. » Quant à l’école primaire, elle est à présent séparée du secondaire. Les bâtiments étant devenus trop petits pour celui-ci, les primaires se sont installés un peu plus loin, dans d’anciens bâtiments industriels.
Une préoccupation : l’enseignement
Il reste, en Communauté française, deux autres écoles de la Sainte-Union, à Tournai et à Kain, où se trouve encore une communauté de religieuses. La congrégation est depuis toujours surtout présente dans le nord de la France (12 établissements). En Belgique, elle a fondé des écoles dans le diocèse de Tournai essentiellement, quelques-unes en Flandre occidentale et deux, trois dans le diocèse de Liège, mais celles-ci n’ont pas tenu longtemps. Au 19e siècle, les sœurs de la Sainte-Union avaient une certaine importance, et en 1960, elles étaient encore environ 1500. Elles sont cependant bien moins nombreuses à présent, il ne reste que deux communautés de religieuses, à Kain et Froyennes. Depuis une dizaine d’années, France et Belgique ne forment dès lors plus qu’une seule province religieuse.
« Quand nous nous sommes retirées de nos écoles et pensionnats, raconte une religieuse de la communauté de Kain, nous leur avons octroyé des dons financiers, pour qu’elles puissent continuer à vivre et à assumer leurs responsabilités. Dans ma communauté, nous ne sommes maintenant plus que trois sœurs, dont deux font encore partie du PO. Auparavant, nous étions toutes enseignantes ou participions activement aux services de l’école, à l’accueil, l’entretien, la cuisine… L’enseignement a toujours été la préoccupation principale des sœurs de la Sainte-Union. »
Aller voir ailleurs…
Bien sûr, si l’esprit de la congrégation reste malgré tout encore bien vivant en Belgique, c’est surtout, comme souvent, à l’étranger qu’il s’est réellement développé et maintenu. « Nous avons régulièrement des contacts internationaux, raconte la religieuse, lors du chapitre général, tous les 6 ans ou des réunions du conseil général élargi. Et, la province franco-belge étant le lieu de fondation de notre congrégation, de nombreuses sœurs étrangères viennent se recueillir chez nous. A une époque, j’ai eu la responsabilité de la province belge. J’ai alors participé à des conseils généraux élargis, en Argentine, en Angleterre, j’ai participé au chapitre général aux Etats-Unis, à un autre en Irlande… J’ai pu aller un peu à la découverte. Cela m’a permis de rencontrer des consœurs, de découvrir différentes cultures de façon concrète, de mieux les comprendre. » Du côté de l’Institut de la Sainte-Union à Dour, Manu Bortolin regrette qu’il n’y ait pas de contact avec d’autres écoles de la congrégation à l’étranger. « A l’ avenir, un des projets de l’Institut sera de développer ces contacts. En France, il existe une tutelle de la Sainte-Union : leurs différentes écoles sont placées sous la tutelle de laïcs, qui remplacent les sœurs et qui se rendent d’école en école. Ils ont aussi des contacts avec certaines écoles d’Afrique, d’Amérique, d’Angleterre. Pour les jeunes, ce serait intéressant de montrer que la congrégation est présente sur d’autres continents et de créer des liens avec celles-ci. »
Mais, comme pour toute congrégation religieuse à notre époque, l’heure est à présent à la question de son avenir… « Nous sommes devenues bien peu nombreuses, constate la religieuse. Un Chapitre général reviendra cet été sur cette question, ainsi que sur celle des structures de la congrégation. La province franco-belge ne pourra plus vivre longtemps, étant donné notre nombre et notre âge. Il faut que cela change. Par contre, en Afrique, il reste des sœurs en surabondance ! »
Brigitte Gerard, dans la Revue « Entrée Libre ».